La figure féminine chez François Villon par Marie Many

Dans cette analyse des personnages féminins et leur importance dans le Testament de François Villon nous passerons en revue différents aspects constitutifs du statut d’auteur au Moyen Âge, des aprioris qui demeurent autour de la figure de François Villon, la structure du Testament et enfin l’analyse à proprement parler deux extraits où le poids des différents personnages féminins contrebalancent leur fonction jusque-là très stéréotypées dans la littérature médiévale. Nous verrons en conclusion que cette démarche n’est pas anodine de la part de l’auteur et que c’est bien une mise en avant de son art qui plane sur ce choix. 

INTRODUCTION : VILLON ET LA LITTÉRATURE MÉDIÉVALE 

Villon est un auteur aux multiples facettes qui alimenta beaucoup d’idées reçues autour de sa personne. Étudiant, voleur, bon vivant et brigand, il est vu comme issu d’une basse condition sociale et donc non-instruit. Cette idée reçue est d’autant plus développée par l’intérêt qu’il suscita au XIXe siècle et sa comparaison avec la figure de poète maudit qui surgit à l’époque. Sa poésie était donc vue comme grasse, vulgaire et simple dont les sujets relève de la critique satirique, de la misogynie et d’un penchant pour le sexe et l’alcool. L’image qui lui a été attachée est comparable avec celle de Rutebeuf, auteur du XIIIe siècle connu pour sa basse extraction et ses critiques virulentes des grands de son temps

Il nous est donc nécessaire de faire la lumière sur ces idées reçues et rappeler quelques vérités sur la littérature médiévale. Le Moyen Âge est misogyne et le concept de féminisme ne lui est absolument pas applicable puisque c’est un concept né au XIXe siècle et donc relativement moderne. Analyser un texte dans une perspective féministe serait alors une dynamique complètement anachronique. Ensuite, la posture d’auteur durant l’ère médiévale est également différente de celle que nous connaissons aujourd’hui. Deux caractéristiques sont à retenir pour appréhender au mieux le rôle d’écrivain au Moyen Âge : l’anonymat et le système de copies. Les droits d’auteur sont bien  évidemment inexistants et la subjectivité de l’individu écrivant n’est pas mise à contribution jusqu’au XIIe siècle avec Chrétien de Troyes qui est un des premiers à se nommer dans son texte ; dans un deuxième temps, c’est le système de copies qui éloigne encore plus l’auteur de sa composition. Ancêtres de l’imprimerie, les copies manuscrites se faisaient par des moines copistes dans leur monastère et représentaient l’unique possibilité de circulation de textes. Cependant, en fonction du niveau d’éducation du moine, de sa région, de sa langue ou encore de son siècle, des variations de certains mots dans leurs copies peuvent survenir et se multiplie en fonction de quels manuscrits sont repris au fur à mesure des lectures et du temps. Pour combler ces erreurs de réception et rétablir autant que possible le texte original, les philologues et médiévistes analysent le plus de manuscrits retrouvés et dressent un arbre généalogique, un « stemma codicum », des différentes formes qu’a pris un mot. Il est donc indispensable pour analyser un auteur médiéval de se référer au texte d’une édition scientifique. 

Dans le cas de Villon, la tradition philologique est d’autant plus importante puisque c’est par ses œuvres que les chercheurs ont pu retracer une biographie sommaire de l’auteur (cf. Annexe). En contrepartie, le danger dans une analyse de ses textes est de les justifier par la biographie. Une autre spécificité de l’écriture de Villon est que son œuvre est urbaine et ancrée dans son temps. Dès lors, certains noms ou expressions renvoient à des établissements, rues ou monuments présents dans le Paris du XVe siècle comme par exemple le « trou de la pomme de pin » qui est une taverne parisienne mais aussi une allusion scabreuse et  la « belle Heaumière » qui était une prostituée connue de l’époque. En plus de cela, Villon est particulièrement friand de néologismes et invente lui-même des expressions ou des lieux fantaisistes qu’il faut différencier des vrais toponymes comme par exemple: « aller à Montpipot » qui signifie tricher, tromper. 

            Sa poésie peut donc être qualifiée de goliardesque puisque Villon est bien issu d’un milieu humble mais a accès à une éducation universitaire. Pour rappel, un goliard est un étudiant qui se positionne en opposition avec l’autorité cléricale, universitaire et urbaine mais qui respecte et excelle dans l’art et le savoir qu’on lui enseigne. C’est donc par ces armes poétiques et linguistiques que Villon joue avec les limites : il va utiliser des ressorts stylistiques, des associations d’idées et des double-sens pour critiquer très ouvertement l’un ou l’autre de ses ennemis jusqu’à un certain point, frôlant l’incorrect, pour revirer sur sa personne et justifier son écart par son pauvreté matérielle, moral et intellectuelle en toute ironie. Ce n’est évidemment qu’un prétexte pour implorer la pitié et les prières du lecteur afin d’éviter d’aller en enfer dès la fin de son Testament. Cette œuvre magistrale, composée vers 1461, est souvent confondue avec le Lai ou Petit Testament écrit lui en 1457. La source de confusion nait dans le récit- cadre du Lai où Villon se met en scène en train de s’endormir la veille d’un long voyage (ou fuite après le vol de Navarre) pour commencer une longue liste de legs satiriques. Il était courant au Moyen Age de faire une liste de ses biens à léguer s’il arrivait malheur lors d’un un long voyage mais cette entrée de jeu n’équivaut pas au  topos (actions traditionnelles typiquement littéraires) de l’écriture avant la mort qui lui est actif dans le Testament. Cette dernière œuvre de Villon est composée de deux grandes parties : les regrets et le testament (legs). 

ANALYSES : LES DAMES DU TEMPS JADIS ET LA GROSSE MARGOT

            Pour ce qui est des figures qui nous occupent, il est important de noter que les personnages féminins sont en équivalence avec les personnages masculins : Villon critique autant d’hommes que de femmes. La différence que l’on pourrait néanmoins souligner est que les hommes sont beaucoup plus souvent nommés par leur nom et prénom dans les attaques de l’auteur. Ils sont pour la plupart de réels ennemis de Villon dont il se moque. On retrouve par exemple Ytier Marchant, Jacques Cardon ou Thibault d’Aussigny, évêque qui emprisonna Villon à Orléans. Les femmes, en contrepartie, sont beaucoup moins nommées et représentent plus la globalisation d’une classe sociale qu’un seul individu. C’est cet aspect féminin que l’on retrouve dans notre première analyse, celle de « La ballade des dames du temps jadis ». Ce titre, attribué par Clément Marot, dénote un poème de ton sérieux. Cette ballade forme un diptyque avec « La ballade des seigneurs du temps jadis » qui la suit directement. Plusieurs lectures peuvent en émaner : l’une peut être sérieuse de par le topos de l’ubi sunt que l’on peut y retrouver puisque le poème chante un passé glorieux où la beauté des femmes légendaires renvoie à la laideur du poète maudit ; l’autre en revanche est moqueuse car les femmes sont également présentées comme dangereuses. 

1) Dictes-moy où, n’en quel pays,

Est Flora, la belle Romaine ;

Archipiada, ne Thaïs,

Qui fut sa cousine germaine ;

Echo, parlant quand bruyt on maine

Dessus rivière ou sus estan,

Qui beauté eut trop plus qu’humaine ?

Mais où sont les neiges d’antan !

2) Où est la très sage Heloïs,

Pour qui fut chastré et puis moyne

Pierre Esbaillart à Sainct-Denys ?

Pour son amour eut cest essoyne.

Semblablement, où est la royne

Qui commanda que Buridan

Fust jetté en ung sac en Seine ?

Mais où sont les neiges d’antan !

3) La royne Blanche comme ung lys,

Qui chantoit à voix de sereine ;

Berthe au grand pied, Bietris, Allys ;

Harembourges, qui tint le Mayne,

Et Jehanne, la bonne Lorraine,

Qu’Anglois bruslèrent à Rouen ;

Où sont-ilz, Vierge souveraine ?…

Mais où sont les neiges d’antan !

ENVOI

Prince, n’enquerez de sepmaine

Où elles sont, ne de cest an,

Qu’à ce refrain ne vous remaine :

Mais où sont les neiges d’antan !

Le motif de l’ubi sunt est directement détourné par l’auteur car c’est normalement à un temps que l’on se réfère et qui permet la plainte en comparaison avec le présent de l’écriture. Ici, Villon parle d’un pays. Cette localisation n’a aucune utilité vu que les femmes dont il est question sont légendaires et donc mortes. Flora, la première figure féminine du poème, est connue par l’histoire comme étant une célèbre prostituée romaine. Dans la même idée, Archipiadès est un homme devenu symbole de beauté féminine par sa coquetterie. Thays peut être une courtisane grecque qui a été au service d’Alexandre le Grand ou Thays d’Alexandrie, qui comme Marie l’Égyptienne, est une ancienne courtisane devenue sainte. La mention d’Écho, personnage mythologique amoureuse de Narcisse, est une référence au Roman de la Rose de Jean de Meun où elle est décrite comme responsable de la mort de Narcisse. Elle est la figure de l’entremetteuse et de la maquerelle car c’est elle qui a aidé à l’infidélité de Jupiter. Les neiges d’antan qui constituent le refrain de la ballade font penser à un temps nostalgique mais au Moyen Âge le mot antan renvoie en réalité à un passé très proche comme « l’année passée ».  Pour ce qui est de la référence aux neiges, elle connote la blancheur du teint féminin mais, et cela renforce l’ironie, elle revient chaque année en hiver. Ces femmes célèbres sont peut-être beaucoup plus communes que l’on ne croit… La neige a évidemment un caractère négatif puisqu’elle fait glisser ceux qui marchent dessus et se transforme en boue une fois fondue. Il n’y a aucun émerveillement autour de la neige au Moyen Âge qui lui préfère le printemps. 

Dans la deuxième strophe, l’on retrouve Héloïse, femme secrète d’Abélard. Elle tient la figure d’intellectuelle de par la formation que le moine lui prodigue mais elle est loin d’être très sage (ironique) puisque c’est bien de sa faute qu’Abélard fut castré. La prochaine figure féminine est la reine qui obligea Buridan à se jeter dans la Seine. Buridan, philosophe français, était la cible d’un conte satirique (très inspiré de l’affaire de la tour de Nesle) où, étudiant, il avait été convié par une princesse pendant la nuit. Une fois avoir couché avec le jeune clerc, elle le jetait de sa fenêtre dans le fleuve. Ici, la mention de cette légende rappelle que c’est la femme qui est dangereuse. On voit que dans le poème « sérieux » de Villon les femmes légendaires réduites soit au statut de prostituée soit au danger et c’est bien là que réside le détournement de l’ubi sunt qui rappelle normalement  des personnages admirables. 

La troisième strophe commence sur une mention de la reine blanche. Alliée avec le lys, elle peut désigner  Blanche de Castille, mère de Saint Louis, roi de France au XIIIe siècle. Elle peut aussi désigner une fée maléfique, ensorceleuse au même titre que les sirènes. Ensuite Berthe aux grands pieds n’est autre que la mère de Charlemagne, elle est une figure beaucoup reprise en littérature. Jeanne la lorraine fait référence à Jeanne d’Arc qui mise en rime avec Vierge souveraine crée l’ironie puisque Jeanne d’Arc fut brûlée sur un bûcher pour hérésie. L’envoi final est traditionnellement toujours destiné au patron mécène du poète. Ici Villon est évidemment un pauvre poète maudit presque mendiant et sans protection qui revient sur son sort et en même temps resouligne l’ironie du texte : aucun prince ne l’écoute, cette ballade n’est adressée à personne.

Passons à « La ballade des seigneurs du temps jadis » qui crée le contraste avec la ballade précédente :

1) Qui plus ? Où est le tiers Calixte,

Dernier decedé de ce nom,

Qui quatre ans tint le Papaliste ?

Alphonse, le roy d’Aragon,

Le gracieux duc de Bourbon,

Et Artus, le duc de Bretaigne,

Et Charles septiesme, le Bon ?…

Mais où est le preux Charlemaigne !

2) Semblablement, le roy Scotiste,

Qui demy-face eut, ce dit-on,Vermeille comme une amathiste

Où est-il ? Où est son tayon ?…

Mais où est le preux Charlemaigne !

ENVOI.

Où est Claquin, le bon Breton ?

Depuys le front jusqu’au menton ?

Le roy de Chypre, de renom ;

Helas ! et le bon roy d’Espaigne,

Duquel je ne sçay pas le nom ?…

Mais où est le preux Charlemaigne !

3) D’en plus parler je me desiste ;

Ce n’est que toute abusion.

Il n’est qui contre mort resiste,

Ne qui treuve provision.

Encor fais une question :Lancelot, le roy de Behaigne,

Où le comte Daulphin d’Auvergne,

Et le bon feu duc d’Alençon ?…

Mais où est le preux Charlemaigne !

La coordination à  la première ballade est marquée par le « qui plus est ? » du premier vers et la même thématique de l’ubi sunt demeure mais du côté masculin. Calixte le troisième est le pape qui réhabilita la mémoire de Jeanne d’Arc après que ses cendres aient été jetées dans la Seine. Cette première figure pourrait marquer la transition entre les deux ballades. Ensuite Alphonse d’Aragon est mort par des concours de circonstances : son bateau a coulé et son palais a pris feu. Il n’est donc pas mort en héros sur le champ de bataille. Quant au « gracieux duc de Bourbon » il s’agit une fois de plus d’une grosse ironie de la part de Villon : le duc avait le visage complètement déformé par les rhumatismes. Même chose pour le duc de Bretagne qui ne fut en réalité duc que pendant 15 mois. Charles le Bon est lui mort de faim par crainte d’empoisonnement. Villon ici inverse la ballade précédente puisque tous ces personnages masculins sont morts récemment à l’exception de Charlemagne qui est la seule figure ancienne du chevalier pieux face à une série d’anti-héros. 

La deuxième strophe s’ouvre sur le roi d’Ecosse connu pour ses taches de vin sur tout le visage. Ces taches,  retenues par la chronique, sont interprétées à l’époque comme un mauvais présage. S’ensuit le roi d’Espagne, qui comme le roi d’Ecosse, n’a pas de nom. Ces personnages importants sont retenus par l’histoire et ne pas citer leur nom est clairement un choix de Villon : il montre qu’il s’en fout, qu’il ne s’est pas donné la peine de les écrire. Les premiers vers de la troisième strophe montrent que tout ce projet d’ubi sunt masculin n’a pas de but. Il renonce à parler de ces grands monarques car ce texte  n’est qu’une illusion. Tous ces personnages aussi riches jusqu’à ceux qui ont à peine assez de provision meurent de toute façon. Une mention à Lancelot V, roi hongrois, dénote encore l’ironie mélancolique inhérente au texte : ce jeune homme est mort à 18 ans au moment où on négociait son mariage avec la fille du roi de France. Pour finir, l’envoi fait mention de Clequin, mort en 1380, qui par sa force lors des combats avait été rajouté à la liste des 9 preux (liste d’héros antiques et médiévaux célébres pour leurs exploits). Cependant, il était également connu pour être très laid, il ne se battait que pour l’argent à l’inverse d’un vrai chevalier et est mort dans son lit et non pas en combattant. 

Pour constat de ces deux ballades, Villon utilise le répertoire de la poésie sérieuse pour complètement la renverser par son ton ironique : les femmes mythologiques qui normalement étaient célèbres pour leur beauté deviennent dangereuses et les hommes connus pour leur vaillance sont en fait cons et lâches. Une deuxième figure féminine clé dans le Testament est celle de la prostituée. Villon ne critique jamais méchamment ces personnages car il a en réalité pour elles un grand respect. Seules femmes qui veulent bien l’aimer, les prostituées sont omniprésentes dans son œuvre car elles sont du même rang social que l’auteur. Ces caractéristiques sont très palpables dans « La ballade de la Grosse Margot ». Le titre annonce le ton cette fois satirique du fabliau et de la farce puisque que Margot est un nom typique de la prostituée médiévale. Cette ballade se trouve dans la fraction des legs que Villon fait aux femmes de Paris. Ici encore, il y a toujours deux lectures de possibles comme l’atteste l’annonce à la ballade :

Item, à la Grosse Margot,

 Tres doulce face et pourtraicture,

– Foy que doy brulare bigot ! –

Assez devocte creature…

Je l’ayme de propre nature,

Et elle moy, la doulce sade.

Qui la trouvera d’aventure,

Qu’on luy lise ceste balade.

La première mention de la Grosse Margot est déjà ambiguë car à l’époque, il n’y avait  pas de numéro de maison, on se référait selon les enseignes. Les étudiants médiévaux, soûls, s’amusaient fréquemment à les voler. Dans une rue parisienne, il y avait bien une enseigne qui s’appelait la Grosse Margot. Il est très possible que Villon y fasse référence pour construire une personne. Mais vu que toutes les ballades léguées par Villon le sont à des gens qui ont réellement vécu à son époque, il est fort probable que la Grosse Margot ait existé mais aucune mention de sa classe sociale n’est faite. Les deux vers suivants spécifient la beauté de Margot et l’assertent de manière solennelle par le bigot ! qui vient de l’ancien anglais « by god ». Elle serait également très dévote, ce portrait de la part de Villon ne pourrait être qu’ironique. Ensuite de propre nature peut avoir plusieurs sens : il fait d’abord référence à l’attirance naturelle, ou par les lois de la nature, c’est-à-dire par les propres attirances sexuelles. Cela peut également signifier « de ma propre nature », c’est-à-dire à ma façon. C’est un amour réciproque, qui est heureux et non courtois. L’auteur s’adresse alors à son lecteur pour lui demander de transmettre un message à Margot : Villon ne la plus vue, ne sait pas où elle est. Elle semble ne pas avoir de domicile soit parce que c’est une vagabonde, soit parce qu’elle se prostitue. De plus, elle ne semble pas éduquée puisque le lecteur doit lui lire la ballade de la part de Villon. Il suppose que quelqu’un la trouvera facilement pour lui léguer la ballade et la lui lira. La ballade, avec tous les indices de l’annonce, est à lire vers par vers, en faisant des pauses. Cela a pour but de ménager le suspense et amener correctement l’effet de retard :

1) Se j’aime et sers la belle de bon hait.

M’en devez-vous tenir ne vil ne sot ?

Elle a en soi des biens à fin souhait.

Pour son amour ceins bouclier et passot ;

Quand viennent gens, je cours et happe un pot,

Au vin m’en vois, sans démener grand bruit ;

Je leur tends eau, fromage, pain et fruit.

S’ils payent bien, je leur dis que « bien stat ;

Retournez ci, quand vous serez en ruit,

En ce bordeau où tenons notre état. »

2) Mais adoncques il y a grand déhait

Quand sans argent s’en vient coucher Margot ;

Voir ne la puis, mon cœur à mort la hait.

Sa robe prends, demi-ceint et surcot,

Si lui jure qu’il tendra pour l’écot.

Par les côtés se prend cet Antéchrist,

Crie et jure par la mort Jésus-Christ

Que non fera. Lors empoigne un éclat ;

Dessus son nez lui en fais un écrit,

En ce bordeau où tenons notre état.

3) Puis paix se fait et me fait un gros pet,

Plus enflé qu’un velimeux escarbot.

Riant, m’assied son poing sur mon sommet,

« Go ! go ! » me dit, et me fiert le jambot.

Tous deux ivres, dormons comme un sabot.

Et au réveil, quand le ventre lui bruit,

Monte sur moi que ne gâte son fruit.

Sous elle geins, plus qu’un ais me fais plat,

De paillarder tout elle me détruit,

En ce bordeau où tenons notre état.

4) Vente, grêle, gèle, j’ai mon pain cuit.

Ie suis paillard, la paillarde me suit.

Lequel vaut mieux ? Chacun bien s’entresuit.

L’un l’autre vaut ; c’est à mau rat mau chat.

Ordure aimons, ordure nous assuit ;

Nous défuyons honneur, il nous défuit,

En ce bordeau où tenons notre état.

Le premier vers de la première strophe pourrait faire penser à une référence à la Vierge de par la formulation traditionnelle. Les deux vers suivants abordent la folie créée par le sentiment amoureux, topos très utilisé au Moyen Âge, l’auteur ne s’excuse pas de celle qu’il ressent pour Margot puisqu’apparemment elle a autant de biens que l’on puisse souhaiter. La mention au vers suivant d’un bouclier et d’une dague fait de la voix narratrice un chevalier servant sa dame. Dès lors quand des invités arrivent à la demeure du couple, le narrateur-chevalier se dépêche d’aller chercher à boire même si le verbe happer dénote une certaine violence. Il va chercher du vin sans faire aucun bruit pour ne pas déranger ses visiteurs. Plus que du vin, c’est également le repas qui est offert. Cependant, cette générosité du maitre des lieux est complètement évacuée par le fait que les invités doivent le payer pour que le narrateur prononce le « bien stat » qui marque un marché conclu, un contrat honoré. C’est le début du renversement de la ballade puisqu’on comprend que ce n’est pas un seigneur, mais un tavernier, vu qu’il se fait payer. Plus qu’un tavernier, le vers suivant montre que c’est les hommes en rut qui viennent le trouver, c’est un proxénète. Cette profession est confirmée par le vers suivant qui montre que le royaume de cette « dame » et de ce « chevalier » n’est rien d’autre qu’un bordel. Dès lors tous les symboles rencontrés  jusqu’ici signalent cette ironie de la part de l’auteur : si le narrateur est vil ou fou c’est parce qu’il exerce un métier punissable moralement, le bouclier n’est rien d’autre qu’une métaphore du sexe féminin et la dague du masculin, et s’il ne fait pas de bruit c’est pour ne pas déranger des clients en pleine action. 

La deuxième strophe se concentre sur le personnage féminin et sur son aspect physique : le demi-ceint et le surcot sont des vêtements généralement portés par les prostituées par leur confection simple mais aussi parce qu’ils laissent apparaitre les formes de la femme. Ici le narrateur l’attrape par ses vêtements parce qu’elle n’a pas assez travaillé que pour payer son mari-employeur et son droit au logis et au couvert qu’est l’écot. Cependant, Margot semble avoir du caractère et crie comme un Antéchrist, qui est une expression de l’époque, qu’elle ne paiera pas. S’ensuit une scène de violence conjugale où le narrateur lui décoche une cicatrice sur le nez avec un éclat de verre ou de bouteille, ce qui n’est pas très malin pour un proxénète vu que Margot sera encore plus laide et qu’elle gagnera encore moins de sous.

La troisième strophe ancre la lecture dans le registre bas et gras par la paronomase paix/pet. Margot est en fait disgracieuse et en plus grosse comme un escarbot c’est-à-dire un coléoptère qui se gonfle des excréments dont il fait provision. Cet aspect bas est ce qui réconcilie et rapproche le couple puisque le narrateur tapote gentiment cette fois la tête de Margot. L’interjection « Go ! go ! » peut être interprétée comme un nouvel anglicisme mais aussi comme l’ancêtre de notre expression « à gogo ».  S’ensuit la réconciliation physique part le fiert le jambon. Margot « fait une bonne tape sur la fesse, sur la cuisse » dans un sens sexuel. Le mot cuisse peut être une métonymie pour l’autre jambonneau qui serait entre les cuisses de Villon. Jambe/Jambonneau désignerait alors le sexe masculin. Après une nuit torride, les deux amants se réveillent le matin pour continuer leurs ébats. Précision est faite sur la position sexuelle choisie : Margot serait au-dessus et Villon en dessous. La raison est mise dans la rime ventre lui bruit/ gâte son fruit. La prostituée serait donc enceinte. La position de la femme sur l’homme n’est pas habituelle à l’époque. À l’époque, les « travailleuses du sexe » sont connues comme stériles ou comme avortant. Le fait que le texte mentionne l’enfant positivement montre que le couple se construit plus sur l’amour réciproque que sur le business. L’ironie est également présente dans cette scène puisque Villon, pauvre et maigre, se fait littéralement écraser par la grosse (= enceinte ?) Margot. 

Enfin la quatrième strophe conclut la ballade et met en avant une sorte de morale. Elle commence par un contentement de Villon : qu’il vente ou qu’il grêle, son pain cuit. On peut comprendre ce vers dans l’idée qu’il gagne son pain avec son bordel mais dans son versant obscène, il signifie que son pain, son enfant, cuit dans le four de Margot. Finalement, par une série de paronomases et de chiasmes, l’auteur conclut qu’il est paillard (vagabond) que Margot l’est aussi et qu’aucun d’eux ne vaut mieux que l’autre. Il aime la crasse et s’aiment entre eux et tant pis si l’honneur les fuit. Ces trois derniers vers marque une provocation de la part de Villon qui insiste sur l’image des débauchés qui aiment ce qu’ils font. Pour constat de cette dernière ballade, on peut retenir que l’ironie du texte attaque les dames et les seigneurs riches. Tous les indices nobles sont en réalités issus du registre bas et ce mouvement de « flétrissement » se retrouve dans le refrain. Mais le gras et le grossier est lui aussi contrebalancé puisque la prostituée, l’image même du péché, devient mère, figure virginale par excellence. Cette évacuation dans les deux sens de ces personnages stéréotypés se termine par une égalité entre homme et femme : Margot et Villon s’aiment tous les deux aussi dégradants qu’ils soient. La dernière strophe marque également la signature de l’auteur en acrostiche ce qui montre que le XVe siècle voit l’arrivé progressive de la reconnaissance de l’auteur et de ses droits sur son œuvre.

CONCLUSION : UNE ÉCRITURE PLUS HUMAINE 

 En guise de conclusion, nous pouvons aisément affirmer l’importance des personnages féminins chez Villon. Celui-ci cherche à réguler le statut féminin littéraire en contrebalançant constamment les deux extrêmes typiques de la littérature médiévale pour remettre ces figures féminines dans un juste milieu, dans une vision plus réaliste et humaine. 

            Prostituée             ———>                    Dame noble ou mythologique

En outre, c’est en décomplexifiant la figure féminine, que Villon réussit à décomplexifier, par ricochet, la figure masculine et par la même occasion la sienne.

            Pauvre poète maudit              ——–>                       Chevalier

En ancrant autant ses personnages dans sa contemporanéité et en décomplexifiant les stéréotypes accrochés aux figures de sexe féminin et masculin, il rend son récit vivant, véridique et humain mais ce jeu des registres permet également à Villon de montrer à son lecteur, possible mécène, l’envergure de sa plume et sa capacité à jongler avec tous les styles d’écriture.

ANNEXES

  1. Repères biographiques de François Villon 
  2. François de Montcorbier = né en 1432

= orphelin de père, sans fortune car abandonné par sa mère

=  recueilli par Guillaume de Villon, maître à la Faculté des Arts de Paris

  • 1452 = seules informations que nous ayons de lui = d’origine judiciaire
  • 1455= blesse mortellement un prêtre = fuite 
  • 1456 = obtention de lettres de rémission = retour à Paris

= nuit de Noël de la même année = en compagnie de 4 complices = vol du Collège de Navarre

= quitte à nouveau Paris par prudence =  probabilité qu’il passe à la cour de Blois. 

  • 1461= emprisonné à Meung-sur-Loire = raison inconnue, sur l’ordre de l’évêque d’Orléans = expérience particulièrement douloureuse = point de départ du Testament 
  • 2 octobre 1461 = libéré  l’occasion de l’entrée de Louis XI dans la ville = retour à Paris
  • 1462 = arrêté pour le vol du Collège de Navarre, révélé entre-temps par l’un de ses   complices

= relâché pour avoir promis de rembourser 120 écus

=fin du même mois = à nouveau en prison à la suite d’une rixe où un notaire pontifical a été blessé.      

            = Condamné à la pendaison = fait appel

  • janvier 1463 = le Parlement de Paris commue la peine en 10 ans de bannissement.
  • Villon quitte à nouveau Paris, et nous perdons alors définitivement sa trace.

2. Ses caractéristiques principales 

Le portrait du frontispice de Levet : se présente comme le bon follastre

  • pieds: pas // = diable 
  • épée: attribut du chevalier
  • yeux: louchent =signe de ruse
  • robe: clerc
  • chapeau: berger
  • corps: arché comme s’il partait
  • mains: mouvement de promesse MAIS de la main gauche

L’inconfort du terrain en anthropologie par Louise Compère

Par ce petit texte, j’ai envie de vous transmettre une autre image que celle qui colle à la peau des anthropologues. Cette discipline est confrontée à de nombreux stéréotypes lorsqu’elle est interprétée par des personnes qui ne connaissent que très peu ce métier.

Hé oui, être anthropologue ce n’est pas uniquement voyager, errer ou boire des grosses chopes avec des Allemands et avoir du mal à se réveiller pour son rdv à l’ONU. (Big up à toi Etienne 😉 !)

En effet, chaque terrain[1], aussi varié, soit-il, comporte de l’inconfort. Cet inconfort est bien plus subjectif qu’un problème ou une difficulté car il n’y a pas de solution, simplement de l’adaptation. De plus, celui-ci est très fortement lié à la sensibilité de l’anthropologue ainsi qu’à ses valeurs, ses codes, le choix de son terrain, etc. C’est pourquoi, il ne faut jamais juger la manière dont un chercheur a agi lors de sa recherche. Il n’y a pas une seule manière de faire un terrain. Tout ethnologue est dépendant de son terrain, des interlocuteurs qu’il rencontre, du temps qu’il dispose, etc.

Il n’y a pas non plus de circonstances déterminées pour que le terrain soit considéré comme « facile » ou « sensible » car tout dépend de la tournure de la recherche et de la personne qu’est l’anthropologue. Être anthropologue, ce n’est pas simplement un métier c’est plus profond que cela car inévitablement, un terrain implique l’être, il peut parfois aller jusqu’à mettre en danger la vie du chercheur. Dans certains cas, le chercheur ne sait plus qu’il y représente et doit se reconstruire en tentant de redéfinir ses nouveaux points de repères et ses valeurs. Tous lieux d’études comporteront des différences au niveau des valeurs.

Contrairement au à priori, la proximité n’est pas le facteur clé à prendre en compte car les acteurs de terrains seront moins indulgents avec le chercheur si celui-ci heurte leur sensibilité alors qu’il vient du « même milieu ». C’est pourquoi un milieu que tu connais bien peut être très difficile tant au niveau de la relation avec les interlocuteurs qu’à cause de la subjectivité qui est difficile à gérer. En effet, l’objectivité doit être le plus possible la norme en anthropologie mais l’ethnologue doit rester conscient de sa subjectivité et doit absolument la prendre en compte lors de la phase de l’écriture. Il est plus difficile d’être objectif sur un terrain que tu as déjà côtoyé auparavant que sur un terrain où le chercheur a tout à découvrir. Il est souvent déconseillé de prendre un terrain trop familier afin de ne pas influencer la recherche et de permettre un décentrement maximum entre le « soi » avant terrain et le « soi » sur le terrain.

Cependant, il y a des moments qui sont plus confrontés à ce malaise. Notamment, l’arrivée sur le terrain. En effet, l’anthropologue aura pu réfléchir, imaginer, autant que possible ses premiers moments sur le terrain, il ne pourra jamais tout anticiper, il ne sait pas à quoi s’attendre. L’inconnu est synonyme de malaise ( mais aussi d’excitation, de challenge) et les évidences n’en sont plus. Le chercheur est en quelques sortes désarmé.

De plus, lors des premiers pas sur un terrain, l’anthropologue est assigné à une place suite à ses traits physiques, sa présentation auprès de ses interlocuteurs, etc.

Au fil du temps, cette place peut varier, évoluer dans un sens ou un autre, auprès de certains interlocuteurs, etc. Il faut être flexible avec cette image assignée et pouvoir cerner vers qui se tourner et dans quelles circonstances. Cette place floue est positive dans la recherche mais n’est pas forcément évident pour l’ethnologue de savoir ce qu’il représente pour ces acteurs. Cela s’éclaircit le plus souvent lors d’un évènement tel qu’un décès, un mariage, un rite particulier, etc. Grâce au temps, les nouvelles habitudes s’installent, l’anthropologue se sent moins « intru » et la subjectivité « s’amoindrit ».

Plus le temps file plus les relations sont de confiance et intéressante pour obtenir des informations. Certes, les premiers contacts ne sont pas toujours concluants et demandent de l’investissement et de la patience. Il faut parfois s’essayer à plusieurs reprises et être prêt à se prendre des refus ou des incompréhensions.

Cependant, il y a régulièrement une différence entre ce que l’ethnologue a et ce qu’il veut de ses relations ce qui peut également provoquer un malaise entre lui et ses interlocuteurs privilégiés. Ces relations peuvent paraitre inégalitaires et posent des problèmes au niveau de l’éthique. En effet, certaines personnes vont consacrer beaucoup de temps pour des récits de vie, parfois douloureux, sans rien recevoir en retour.

Cette discipline a des difficultés à se détacher de la vision du « voyeurisme » car pour mener à bien sa recherche, le chercheur est amené à rentrer dans l’intimité[2] des personnes sans pour autant adhérer à leurs pratiques et à leurs pensées. Il doit s’imposer ses propres limites tout en assurant la pertinence de son étude.

En conclusion, l’inconfort se traduit différemment sur tous les terrains mais c’est un facteur à ne pas négliger. Au contraire, c’est une source d’information grâce à des marqueurs implicites tels que des silences, des quiproquos, etc . En effet, ils permettent de se rendre compte de certaines valeurs et permettent de creuser des pistes auxquelles l’anthropologue n’aurait pas penser. Cet inconfort peut survenir partout, à tous moments et avec des intensités différentes.

Chaque anthropologue est libre de gérer sa recherche afin de trouver son équilibre entre sa vie privée et professionnelle. Cependant, les deux deviennent intrinsèquement lié au fur et à mesure des années. En effet, les ethnologues sont des êtres humains impliqués et leur vie peut être chamboulée suite à un terrain de plus ou moins longue durée par leur vision qui change, par les personnes qu’ils rencontrent, etc.

Toute recherche est confrontée à de multiples questions sans réponse-type. Il n’y a pas une méthode à suivre et c’est ce qui peut être difficile car le chercheur est seul face à ses potentiels malaises.

Je n’ai évidemment pas été exhaustive au niveau des différents types d’inconfort car il en existe également après le terrain lors de la phase d’écriture.

Comment l’anthropologue doit-il s’inclure dans son écriture ? En « JE » ? En « Nous » ? Doit-il remettre en question ses propos alors qu’il les a vécu de cette manière ?


[1] Lieu où l’on récolte les données, l’espace d’étude au contact de la population étudiée

[2] A comprendre au sens large du terme et non comme le concept

Breath4Life : le projet de respirateurs développés à l’UCLouvain durant la crise du COVID-19

Avec l’arrivée du COVID-19 en Europe et plus particulièrement en Belgique début 2020, une croissance exponentielle des cas en détresse respiratoire a été constatée. Rapidement, des médecins ont signalé qu’un manque de respirateurs pouvait avoir lieu ce qui pouvait limiter fortement sur la capacité des hôpitaux à réagir efficacement contre le COVID-19. En plus du fait que le nombre de lits accrédités en Belgique est en constante diminution (environ -7% en 30 ans [1]), ce type de matériel médical est onéreux et non disponible en grande quantité. Le système hospitalier a donc été mis à rude épreuve [2].

Pour essayer de répondre à ce problème, le projet appelé « Breath4Life » a été mis en place rapidement (kick-off le 17 mars 2020) sur base d’une implication volontaire. Une équipe multidisciplinaire regroupant des médecins, des ingénieurs, des acteurs de l’industrie, … s’est mise sur pied. Au total, Plus de 200 personnes ont été impliquées. La majeure partie du développement a eu lieu à l’OpenHub de Louvain-la-Neuve et une énergie importante a été investie par plusieurs chercheurs de l’UCLouvain. Il est important de noter que cette initiative n’est pas une exception : plusieurs autres universités (MIT, VUB, UNamur, …) ont également travaillé sur des projets similaires ou parallèles.

Le projet Breath4Life visait deux objectifs principaux. Premièrement, répondre à une urgence en fournissant des respirateurs à bas coût et avec un cycle de production court, en s’assurant que les composants utilisés soient le plus disponible possible. Les respirateurs n’ont pas été conçus pour une application commerciale à long terme mais bien pour traiter les patients atteints du COVID-19 durant le 48 à 72 premières heures (= solution tampon). Il est important de noter que bien que ce projet tente de répondre à une urgence, il n’est évidemment pas exempté de remplir les standards en vigueur dans le domaine médical bien qu’un tri ait été fait pour se concentrer sur l’essentiel. Le modèle de respirateur devra être soumis à vérification et certification par les autorités compétentes (AFMPS/AFGG). Deuxièmement, le caractère open-source du projet était fondamental : les respirateurs Breath4Life doivent être entièrement documentés sur la plateforme fablabs.io et pouvoir être assemblés partout où un FabLab est disponible. 

J’ai eu l’occasion d’apporter une contribution à ce projet en rejoignant l’équipe électronique du projet. J’ai travaillé durant les premières semaines sur la gestion des alarmes et l’interface utilisateur. Pour simplifier, un système électronique est composé d’un « cerveau » permettant de gérer les informations provenant de capteurs mais également de commander l’actuation via des moteurs, des alarmes, … tout en affichant des informations pour l’utilisateur. De nombreux composants doivent être correctement sélectionnés, programmés et agencés dans un système cohérent et efficace. De nombreux challenges sont à relever pour assurer le bon fonctionnement en temps réel ainsi que la sécurité des utilisateurs et patients. 

Pour terminer, bien que ce projet ait été extrêmement enrichissant d’un point de vue personnel et je pense d’un réel intérêt sociétal, il est peu probable (selon les médecins belges impliqués dans le projet) que les respirateurs Breath4Life soient utilisés en Belgique pendant la crise du COVID-19 car la capacité des hôpitaux semble suffisante pour gérer la situation (du moins jusqu’à présent) [3]. Dans tous les cas, d’autres leçons importantes sont à tirer comme par exemple la nécessité́ de créativité́, de collaboration et de compétences locales ou l’intérêt de recherches scientifiques sur la préparation de solutions techniques anticipées pour des scénarios de crise.

Thibault Pirson

Bibliographie :

[1] https://www.healthybelgium.be/en/key-data-in-healthcare/general-hospitals/organisation-of-the-hospital-landscape/categorisation-of-hospital-activities/evolution-of-the-number-of-accredited-hospital-beds

[2] https://breath4life.odoo.com/

[3] https://www.rtbf.be/info/societe/detail_coronavirus-en-belgique-les-chiffres-du-nombre-de-personnes-hospitalisees-infographie?id=10458755

L’Ouïe de Finesse 2

Et Socrate répondit « oh mais arrête un peu et viens tâter du jeunot. Non ? C’est Platon jour ! » Voila comment se sont rencontrés les deux philosophes, mais ça c’est une autre histoire. Bonjour !

Confinés. Ou plutôt, condamnés à être confinés. Et comme quand on se fait chier, l’humain fait n’importe quoi. Des défis aussi ahurissants les uns que les autres. Du style : j’affone plus vite que mon chien ; ma liste des 10 films porno préférés où on voit maman ; ma liste des 10 films porno préférés où on voit grand-père dans maman ; …

Heureusement que dans tout ça, certains musées permettent des visites virtuelles. Et il paraît que c’est tellement bien fait qu’ils ont même reconstitué le gardien qui fou que dal et qui passe son temps à dire « no photo please ». Tu sais, ce type qui ressemble soit à un mannequin, soit à ton oncle, moustache et grosse bedaine. Je sais lequel tu préfères, ta culotte est entrain de perler. Cochonne. Mais si … Je te jure, tu vois bien de quoi je parle. Mais si, le mec qui fait partie du musée mais qu’on ne voit plus. Un exemple pour que ca soit plus parlant ? … Bah prend Virgile. Voila, tu as compris.

D’autres, comme Amélie, 101 ans, coud des masques. Alors, je ne néglige pas l’importance du travail répétitif pour améliorer l’autonomie des personnes handica … enfin, vieilles. Mais quand même. La dernière fois qu’on a vu autant de couture, c’est sur la gueule à Catherine Deneuve. 

Néanmoins un problème est arrivé lorsque, Amélie, de son grand âge, a confondu son tissu et ses pampers. Je ne vous dirai rien de la situation des personnes qui portent ces masques mais sachez seulement que si vous voulez voir à quoi ressemble une « tête de cul », c’est là-bas qu’il faut aller.

Si vous râlez, comme moi à chaque chronique, dites-vous que Daria 14 ans, vient d’accoucher d’un bébé dont le père a 10 ans. Est-ce que l’école acceptera les congés parentaux ? Est-ce qu’on peut avoir des allocations familiales quand on est enfant ? Encore deux qui vont tout se faire sucrer mais qui vivront d’amour, d’eau fraiche et de responsabilités qui les dépassent. C’est pas beau d’être parents ?

L’ouïe de finesse

Résumé de la présentation portant sur : L’utilisation de la technologie eNose dans le milieu médical

Aujourd’hui les techniques médicales sont sans cesse remises en question afin d’être améliorées et de nouvelles méthodes émergent. Le diagnostic médical tel que nous le connaissons ne porte aujourd’hui que sur deux principales analyses : la prise de sang et les tests d’urine. Il était intéressant de compléter celles-ci, tout en gardant certains points à l’esprit : le coté non invasifpeu couteuxnon douloureux et surtout facilement applicable lors d’un diagnostic rapide. Une technologie sort alors du lot en respectant ces différents critères : la technologie eNose !

Un peu d’histoire… Il faut savoir que c’est en ~400 avant J.-C. que la première allusion à l’analyse de l’haleine fut introduite, par Hippocrate, philosophe et médecin grec de son époque. Son analyse portait sur une certaine odeur perçue dite « fetor hepaticus » ou haleine de mort, qui définissait un certain biomarqueur qui fait aujourd’hui référence aux hépatopathies ou maladies du foie

« Et en quoi ça consiste un eNose ? » Parlons un peu du concept : un eNose est constitué principalement d’un tableau de capteurs chimiques ayant différentes spécificités, afin de reconnaître un maximum de composantes environnantes,  permettant de transformer cette composition chimique en signal électrique, qui, par la suite, pourra être traité et analysé. Cette capacité à analyser le signal reçu fait aussi partie intégrante du module, il s’agit du système d’identification de patterns (motifs). Ce dernier permet d’analyser la forme, ou la constitution, du signal reçu et ainsi, grâce à une base de données avec laquelle le système est entraîné (par Machine Learning), reconnaître de quel type de composant volatile il s’agit.

« Comment cela fonctionne concrètement ? » Les étapes clés du fonctionnement de cette technologie sont les suivantes : tout d’abord les différentes composantes environnantes interagissent avec les différents capteurs, ce qui produit un signal électrique qui, avant d’être comparé à la base de donnée, va être traité afin d’enlever toutes composantes liées au bruit, finalement celui-ci sera identifié et renvoyé à l’utilisateur (voir fig. 1).

« N’existe-t-il pas d’autres technologies remplissant ces objectifs ? » : Il en existe une, la spectrométrie de masse, mais celle-ci est très encombrante et très coûteuse et donc difficile à intégrer pour un diagnostic rapide et systématique.

Fig.1 – Comparaison eNose vs. Système olfactif de l’être humain

« Est-ce que cette technologie peut être utilisée à d’autres fins ? » Tout à fait, elle est d’ailleurs très rependue dans le domaine de l’industrie alimentaire ou de l’agriculture, là où elle est capable de détecter des maladies, contaminations, infections,… Mais ce n’est pas tout, elle est aussi très étudiée dans le secteur de l’environnement principalement pour l’analyse de la qualité de l’air. Finalement elle peut aussi être utile dans le domaine de la sécurité pour la détection d’éventuels agents explosifs/nocifs. 

« Quelles sont les maladies concernées par cette technologies ? » On retrouve dans les études et expériences, 4 secteurs principaux touchant les voies respiratoires : les obstructions, les maladies inflammatoires, les maladies infectieuses, les cancers. C’est pour le premier de ceux-ci que nous pouvons retrouver le plus de résultats publiés et une précision des tests la plus élevée. Cette technologie a pour but principal d’orienter le médecin lors de son diagnostic, pouvant distinguer une maladie d’une autre lorsque les symptômes sont quasi identiques. Ce qui permet d’éviter de perdre du temps lors de longues procédures d’analyses et de tests et également de réduire les coûts de ces derniers.

« Quelles en sont les limitations ? » Tout d’abord, bien que ce ne soit pas son premier but visé, il faut savoir que le eNose n’est pas (encore) capable d’identifier et quantifier chaque composant chimique présent dans un échantillon, ses résultats de ne se base que sur la forme de l’ensemble de l’échantillon. Néanmoins, il est possible de combiner son analyse avec celle de la spectrométrie de masse pour plus de détails. Ensuite, la technique employée pour les différents tests n’est pas encore complétement définie, les irrégularités des prises d’échantillons d’une étude à une autre peut impacter les résultats de manière significative. Un protocole mieux défini permettrait de meilleures comparaisons entre chaque étude. 

Merci pour votre lecture et écoute lors de ma présentation,

Aurore C.

Les neurosciences : De la lésion à la prothèse

  1. Introduction

J’ai décidé de vous parler de prothèses car c’est un domaine qui me fascine et dans lequel j’aimerais travailler plus tard.

Mais comment vous parler de prothèses sans vous expliquer comment le système moteur fonctionne et quelles sont les lésions entrainant la nécessité d’une prothèse ? 

Dans ce document, vous pourrez retrouver un résumé de ma présentation du 27 Avril.

  • Le système moteur
    • Le système nerveux
Une image contenant dessin, plage

Description générée automatiquement

Tout ce que nous faisons est régi par notre système nerveux.  Ce dernier est décomposé en deux parties : 

– Le Système Nerveux Central (SNC) : Cerveau + Bulbe rachidien + Moëlle épinière

– Le Système Nerveux Périphérique (SNP) : Nerfs crâniens + Nerfs périphériques

  • Cartographie du cerveau

Le cerveau est divisé en lobes, eux-mêmes divisés en aires

corticales. Les aires qui vont nous intéresser ici sont les aires motrices et somatosensorielles. En effet, chez l’homme, le système moteur est en étroite collaboration avec les fonctions cognitives. On le remarque par le fait que les enfants apprennent à compter sur le doigts ou que l’on s’aide des mains pour parler.

Suite à diverses expériences les scientifiques ont pu cartographier le cerveau encore plus précisément et créer ce qu’on appelle une représentation somatotopique des aires corticales.

  • Fonctionnement neuro

La moëlle épinière est constituée de fibres motrices descendantes et de fibres sensitives ascendantes. À chaque

vertèbre, des racines donnent naissance aux nerfs périphériques. Les signaux électriques sont transportés par des neurones. Les fibres motrices sont constituées de motoneurones provenant de l’aire motrice du cerveau et projetant vers les membres. Les fibres sensitives, quant à elles, prennent les informations sensorielles provenant des membres et ramènent ces infos vers le cerveau.

Ces informations sensorielles vont orienter nos mouvements, de manière rétroactive en corrigeant nos mouvements, mais également de manière anticipatives en analysant par exemple, le poids d’un objet.

L’essentiel à retenir dans le cadre de cette conférence est que toutes les informations essentielles afin de mouvoir un membre passent du cerveau au muscle et inversement par la colonne vertébrale.

  • Les lésions
    • Paralysie

Une paralysie est une perte de motricité et de sensibilité qui atteint une partie du corps. Si elle est incomplète on va parler de parésie. Les paralysies sur lesquelles je vais me concentrer sont les paralysies centrales. Ce sont des paralysies dues à une atteinte au niveau du SNC. 

Il y a 3 grands type de paralysie centrale : l’hémiplégie, la paraplégie et la tétraplégie.

  • HEMIPLEGIE 

C’est une paralysie de la moitié droite ou gauche du corps. Lorsque certains mouvement restent possibles on parle d’hémiparésie.

Il y a plusieurs origines : vasculaires, tumorales, traumatiques ou infectieuses. Les plus connues sont les hémiplégies d’origine vasculaire et sont appelées AVC. Elles ont un début brutal et peuvent régresser plus ou moins complètement. Contrairement, celles dues à une tumeur arrivent lentement et s’aggravent progressivement.

  • PARAPLEGIE

La paraplégie est une paralysie de la moitié inférieure du corps (Partie basse du tronc et membres inférieurs). Elle est due à une lésion (compression ou section) de la moëlle épinière dorsolombaire, entre la 7e vertèbre cervicale et la 2e vertèbre lombaire. En dessous on parle de syndrome de la queue de cheval (trouble vésico-sphinctériens sans paralysie motrice) et au-dessus de tétraplégie. 

La cause la plus fréquente de paraplégie ce sont les accident de la circulation.

  • TETRAPLEGIE

La tétraplégie est une paralysie des membres supérieurs. C’est la forme la plus invalidante de toutes ces paralysies centrales. Les troubles sphinctériens sont quasiment toujours présents.

La cause principale de tétraplégie est également accidentelle. Que ce soit accident de la route ou coup du lapin. Comme par exemple suite à un plongeon raté, une chute à cheval, accident de parapente, etc.

Attention que toutes les paralysies complètes ne sont pas des tétraplégies. Stephen Hawking, par exemple, souffre d’une sclérose latérale amyotrophique.

  • Amputation

Les causes principales d’amputations sont :

  • Les maladies (80%) : Diabète, Artérites (Gangrène), Ischémie (Tabac), Cancer
    • Traumatique / Accidentelle (20%)
    • Les malformations congénitales
    • Les guerres / Sanctions religieuses ou politiques
  • Les prothèses
    • Pour membre manquant

Il existe deux types de prothèses, les prothèses actives et les prothèses passives.

Les passives sont dites « esthétiques », elles ne bougent pas et ne servent qu’à cacher le moignon.

Au niveau des prothèses actives, il y a deux types généraux : les prothèses mécaniques et les prothèses myoélectriques. Les prothèses mécaniques sont contrôlées par une autre partie du corps, l’épaule par exemple. Dans le cadre d’un de mes projets on a confectionné un prototype de prothèse pour main qui fonctionnait par flexion du poignet.

Les myoélectriques quant à elles, utilisent un signal électrique créé par les muscles du membre restant. Pour des raisons pratiques il n’est pas possible d’avoir une prothèse à la fois esthétique et mécanique. C’est néanmoins en cours de développement. 

Voici les avantages inconvénients d’une prothèse myoélectrique :

Avantages myoélectrique :

  • + Esthétique
  • + Léger
  • + Pratique
  • – Douleur du membre fantôme 

Avantages mécaniques :

  • +Durable
  • – Temps d’apprentissage
  • – D’ajustement
  • – De maintenance
  • Feedback possible

Les prothèses des membres inférieurs sont bcp plus fréquentes que celle du haut du corps étant donné que on ne peut compenser la perte d’une jambe aussi facilement que la perte d’une main dans la vie quotidienne.

  • Pour membre paralysé

Pour ce qui est de la paralysie, un certain type de prothèse est en cours d’étude. Il s’agit des neuroprothèses autrement appelées déviation neuronale.

Pour le moment, des études sont réalisées aux Etats-Unis afin de permettre à des tétraplégiques de bouger leur bras grâce à des prothèses couplées à des implants cérébraux. Le principe est de placer des électrodes implantées dans le cerveau, à la surface du cortex moteur. Ces électrodes sont reliées à une sorte de manchon apposé sur l’avant-bras du patient. Ce manchon renferme 130 électrodes stimulant les muscles du bras à travers la peau. Un système électronique (ordinateur volumineux) permet de décoder les signaux venant du cerveau et de les traduire en d’autres signaux qui vont permettre de stimuler les muscles.

Le patient paralysé sera donc capable de bouger son bras uniquement par la pensée.

Jusqu’à mtn la dérivation neuronale a été utilisée pour permettre à des tétraplégiques de commander par la pensée des bras robotisée mais la recherche tend à restaurer les mouvements du propre bras du patient.

Certaines expériences ont déjà montré que des patient étaient capables de se servir un verre seul, de boire une gorgée de café ou encore se gratter le nez. (Ian BURKHART – Bill KOCHEVAR)

  • Conclusion

J’espère que après avoir lu/entendu cette conférence, vous avez pu découvrir ce domaine, apprendre de nouvelles choses ou juste vous divertir un petit peu. 

Le domaine des neurosciences est un domaine très large et en perpétuelle évolution, je n’ai couvert qu’une toute petite partie. N’hésitez pas à fouiller un petit peu si ça vous a intéressé.

Par Sophie L.